L’hiver avait glissé doucement, ayant lancé
son avant-garde de brumes automnales et des pluies propres à faire savoir à
tous que l’hiver allait arriver, comme si on pouvait en douter. Quelque chose
laissait supposer que l’on ne passerait pas Noël au balcon. Tant mieux, d’un
côté, car il semble tout à fait normal que chacun demeure dans son rôle.
Trop souvent, à force de voir des gens qui
cherchaient à se faire passer pour ce qu’ils n’étaient pas, à voir des loups
politiques faire limer leurs dents afin de faire oublier qu’à la fin, comme
tout loup, ils nous croqueraient sans pitié, en dépit des beaux sourires
figurant sur leurs affiches, tandis que des agneaux se faisaient mettre des
crocs dont jamais ils n’auraient l’usage, puisqu’ils paissaient dans les prés,
voilà que les saisons jouaient des rôles qui n’étaient pas le leur.
Visiblement, l’hiver serait l’hiver et pour
la nature ce serait bien mieux.
Monsieur Salmigondi, sans doute frappé de
folie, — car qu’est-ce qui pourrait bien
pousser un homme normal et sain d’esprit à revenir au beau milieu des
turpitudes d’un village si différent des autres par son paysage et pourtant si
semblable par tant de traits de ses habitants ? —, était revenu en
janvier de cette nouvelle année pour une semaine.
Ce jour-là s’avérait un jour comme les
autres, à savoir que malgré une fin d’automne tout à fait novembrine, et un
début décembre pluvieux, afin d’empêcher les plantations des vignes anciennes
arrachées après les vendages, janvier était sec, voire un peu chaud et le
touriste s’en frottait les mains, tandis que les philosophes de comptoir
dissertaient au Café comme chez soi.
— Per la
miseriaccia ! Bientôt la saison d’été va commencer en
janvier ! dit le patron du café. Je ne vais plus pouvoir prendre de
vacances !
— Pourquoi ? J’ai toujours eu l’impression que tu étais en
vacances ! rit Paolu, un client dont le métier principal consistait à lancer
des burle pour se moquer des travers
des autres. Souvent, nous faisons le service à ta place !
— Contrôler si vous l’avez bien fait m’épuise !
— Tout ça ne me dit rien qui vaille ! marmonna Petru, un
ancien dont le seul mérite consistait à ne pas être mort. Il doit faire froid
en hiver !
— Sage devise qui devrait gouverner le monde ! taquina
Paolu. Il faudrait un monde réglé comme une horloge franc-comtoise, avec un
coucou comme Petru qui sortirait pour annoncer les saisons et le temps qu’il
conviendrait de faire !
— N’empêche que de mon temps…
— Il pleuvait pendant la pluie et il ventait durant la
tempête ! N’empêche que les feuilles étaient à l’heure ! Elles sont
tombées en automne !
— Moque-toi, moque-toi ! râla le vieux philosophe de
comptoir. Il n’empêche que les saisons sont toutes déglinguées ! Il peut
en juillet et en août, tout comme à la fenaison ! Puis, il fait sec durant
les vendanges avec un ciel couvert et un temps humide, avant même l’automne,
puis il pleut quand les clémentines n’ont plus besoin d’eau ! Les saisons
sont devenues folles !
—À force de voir les hommes, elles se mettent à les
copier ! taquina Paolu en buvant son verre de pastis. C’est comme les
vieux ! De ton temps, ils mouraient à cinquante ou soixante ans, à
quarante ans ils en paraissaient vingt de plus et à soixante, ils semblaient
des vieillards ! Maintenant, un vieux machin comme toi a plus de
quatre-vingts ans, il boit du whisky à l’apéro…
— Sans oublier que tu creuses le déficit des caisses de
retraite, à défaut de vouloir creuser ta tombe ! gloussa le patron.
— Je vous l’ai dit : je vais tous vous enterrer,
tas de vauriens sans considération !
— Ne parle pas du respect dû à tes cheveux blancs !
reprit Paolu. Tu as le crâne qui ressemble au Mont Pelé ! Si ça se trouve,
tu as les cheveux noirs !
— Riez, riez ! N’empêche que ce temps sec ne me dit
rien !
— Il a plu un peu, ces jours-ci ! se rassura le
patron.
— Il y a eu du vent et tout est à nouveau sec !
— Je n’aime pas ça !
— Pourtant…
Tel un taon perturbant le silence de midi,
monsieur Salmigondi venait d’intervenir, alors que jusqu’ici il lisait tranquillement
son journal qui s’attachait à souligner les erreurs vénielles des hommes
politiques qui n’étaient pas en odeur de sainteté auprès de la rédaction, en
les montant en épingle, tandis qu’on minimisait les bourdes de ceux qui avaient
reçu l’adoubement du patron du canard.
Soudain, après ce pourtant intempestif, le silence se fit dans la salle du café.
Pire, voilà que le touriste venait de s’inviter dans une discussion réservée à
un cénacle de philosophes des agapes apéritives. Or, il n’était pas un disciple…
— Pourtant, le maquis est moins sec en cette
saison ! osa poursuivre le non initié.
— Monsieur Salmigondi, vous êtes bien brave, n’est-ce
pas ! Déjà, on vous accepte même en hiver, après vous avoir supporté en
été ! répliqua le cafetier.
— Tandis que j’ai contribué à faire tourner votre
commerce !
— Vous savez bien que je n’ai pas besoin de cet
argent !
— Il n’empêche que chez vous rien n’est gratuit !
— Sauf ses remarques ! rit Paolu.
— Mais, ce serait la ruine pour mon porte-monnaie et ma
santé ! hurla le commerçant. Songez : si tout était gratuit, on
viendrait même des autres villages, je travaillerais comme un fou et j’en
tomberais malade ! Alors que si je fais payer, ça couvre l’électricité,
l’eau, et les autres charges ! Mais, ça ne me rapporte rien ! Ici,
c’est ouvert pour mon plaisir !
— Oui ! Le plaisir de faire attendre les
clients ! gloussa Petru.
— Comme ça, vous buvez moins et vous pourrez dépasser
les quatre-vingts ans !
— Monsieur, je ne vous connais pas ! dit Petru.
Quand vous êtes venu cet été, j’étais chez mon fils, à la montagne ! Mais,
sauf votre respect, vous ne connaissez pas le maquis et pas la Corse !
— Je ne prétends pas vous en apprendre !
— Vous voyez, bande de malappris ? Monsieur
respecte mon grand âge ! Pourtant, je dois vous contredire ! Il y a
un point sur lequel vous êtes ignorant, sans vouloir vous insulter, comme la
plupart des touristes !
— Mais, je ne demande qu’à apprendre !
— Un bon élève ! Tant mieux ! Vous avez pensé
aux fougères ?
— Les fougères sont vertes !
— Regardez à travers les carreaux de la porte et
dîtes-moi comment elles sont !
Monsieur Salmigondi s’exécuta, sentant
qu’il avait dû lâcher quelque niaiserie. Là, il réalisa que l’image des
fougères vertes en plein été était demeurée imprimée sur ses rétines, au point
de lui masquer la réalité des choses.
Un peu comme lorsqu’il se représentait son
visage, sans l’aide d’un miroir, il se le représentait toujours avec une
éternelle jeunesse, chose que la Nature se plaisait à contrarier. En se rasant,
il apercevait bien le visage vieilli, marqué par l’amertume des rêves non
exaucés, des idéaux abandonnés et des amours déçues.
Il n’empêchait que, très rapidement dans la
journée, il ne se voyait plus avec ce visage étranger et se représentait le
Salmigondi de ses vingt ans.
— Ma parole ! Elles sont sèches et cuivrées !
— Vous voyez, quand elles sont comme ça, c’est comme de
l’essence !
— De l’essence de fougères ! pouffa Paolu. Mais,
impossible d’en trouver à la pompe ! Et pour les parfumeurs, ce n’est pas
terrible !
— Une fois, je me souviens…
— Il arrive encore à se souvenir ! souligna le
taquin.
— Ce devait être dans les années soixante ! On
était en hiver et on enterrait quelqu’un ! Il a fallu quitter le cimetière
pour aller défendre le village de l’incendie ! Et à l’époque, les terrains
étaient plus entretenus par leurs propriétaires ! Pas comme à
présent !
— Mon grand-père m’a parlé d’un fait semblable dans les
années quarante !
— Et pareil pendant la Grande Guerre ! ajouta le
cafetier. Les prisonniers turcs ont sauvé le village, puisque la plupart des
hommes étaient au front !
— Alors, croyez-nous : s’il y a un moment plus
dangereux encore que les autres, c’est bien maintenant ! Les pompiers
redoutent quand l’hiver arrive !
— Comme dans Game of Thrones ! lança,
pince-sans-rire, Paolu. Winter Comes !
Mais ce qui nous vient en hiver, ce n’est pas le froid et les morts, mais
l’incendie le plus redoutable de tous, qui met des vies et les maisons en
danger !
— Le dernier, ce devait être en janvier quatre-vingt-un
ou quatre-vingt-deux ! On a bien failli y passer ! Même les pompiers
n’en menaient pas large !
— Juste avant les années vingt, puis dans les années
quarante, puis soixante et quatre-vingt… Ça revient tous les vingt ans !
remarqua Salmigondi.
— Là, ça fait plus de trente ans ! Dieu nous
garde ! dit l’ancien.
Dans les jours qui suivirent, se leva un
vent soutenu et un feu se déclara de l’autre côté du barrage. En face de
l’endroit où était venu en vacances monsieur Salmigondi, le village faillit
être la proie des flammes et il ne restait que la lèpre noire de l’incendie qui
avait quasiment effacé toute la verdure si plaisante à voir.
Des bergeries et des troupeaux y étaient
passés, mais, en dépit de ces pertes, rien qui ne fût à terme irréparable, même
si on ne pouvait ainsi dire la chose à un berger. Pas de morts parmi les
villageois et pas de maisons brûlées.
Puis, l’incendie avait commencé à migrer
vers le nord, attaquant les villages voisins. Les Canadairs et les pompiers
étaient venus en renfort, car la Corse n’avait pas les moyens de lutter contre
un tel ravage.
Les clients du Café comme chez soi,
réaction tout à fait humaine, éprouvaient des sentiments de compassion, tout à
fait honorables, parlant d’aider financièrement, par la suite, les victimes des
incendies, et celui moins avouable du soulagement d’avoir échappé à la
catastrophe. Nul n’osait l’avouer ouvertement.
Ce soir-là, vers les dix-huit heures, ils
furent témoins d’un spectacle horrible et fascinant : la tempête s’était
muée en ouragan et des flammes attaquèrent le bas d’une montagne, puis,
soudainement, l’immense flamme grimpa et incendia toute la paroi, s’élevant
comme un gigantesque bûcher dans le ciel crépusculaire.
Petru se fit un signe de croix et pria, en
son for intérieur, pour que nul ne se trouvât sur le chemin de cet incendie
titanesque. Allait-il rester du maquis de ce côté-là du barrage ? Des
maisons avaient-elles été brûlées ? Car des maisons qui brûlaient, même
sans personne à l’intérieur, risquaient de ne pas être reconstruites.
Or, avec les villages qui se mouraient en
raison de la désertification du monde rural au profit des grandes villes, et
des jeunes qui ne revenaient plus, une fois leurs parents décédés, sauf pour la
Toussaint, c’étaient les villages qui sombraient dans la vieillesse et
s’éteignaient tout doucement. Quelle Corse pour demain ?
Soudain, un villageois entra comme un fou
dans le café.
— Vous feriez mieux de tous venir ! hurla-t-il
effrayé.
— Oh ! Qu’est-ce qu’il y a ? Un arbre est
tombé sur une maison ? demanda Paolu, pour une fois sérieux, car le ton du
nouvel arrivant l’avait saisi.
— La ligne électrique s’est brisée, avec ce vent
violent, et le câble a touché la route !
— Il y a des morts ? demanda le cafetier.
— Pas encore ! Mais, il y aura bientôt cinq
couillons qui vont griller dans un bar, s’ils continuent à parler pour ne rien
dire !
— Griller ?
— Le câble a fait jaillir des étincelles et les fougères
ont pris feu ! Il y a le feu et il vient vers le village ! Il faut
défendre les maisons !
Sur ce la maire du village entra à son
tour et exhorta les hommes présents.
— Vite ! Que les personnes âgées, les femmes et les
enfants quittent le village pour se réfugier dans la plaine ! Tout ceux
qui veulent rester pour lutter contre l’incendie sont les bienvenus !
— Et les pompiers ? Ils sont avertis ?
— Oui, mais je ne sais pas s’ils auront le temps
d’arriver avant le feu !
Chacun alla voir ce qui se passait, sur la
place et là, on vit au loin le feu qui arrivait. Des voitures passaient avec
des enfants, des mères, des grands-parents. Des chiens, venaient se réfugier près
des hommes rassemblés, des jeunes partaient en courant vers les hauteurs du
village, totalement affolés. D’autres, dans le même état d’esprit,
abandonnaient leurs maisons et venaient sur la place.
On entendait le vent siffler avec une
violence rare et les flammes crépitaient. Le maquis et les châtaigniers n’étaient
qu’un vaste champ brûlant où l’incendie survenait au triple galop, tel un
troupeau de chevaux affolés.
— Il faut défendre les maisons ! Vérifiez que
toutes les fenêtres et les portes sont bien fermées, munissez-vous de tuyaux et
de seaux, et luttez pour empêcher les flammes d’avancer ! Une fois une
maison bien fermée, le feu ne peut plus qu’entrer par le toit ou en brûlant le
bois des ouvertures !
Dans les heures qui suivirent, chacun lutta
comme il pouvait. Le feu avait atteint les limites septentrionales du village,
quand le vent tourna vers l’est. Puis, une fois parvenu au sommet de la colline
bouchant une partie de la vue sur la plaine, il tourna à nouveau vers l’ouest
pour revenir et attaqua les maisons par le dessous du village, du côté oriental.
C’était du chacun pour soi, puisque le feu avait coupé les routes. On ne
pouvait venir du village voisin ni de la plaine. Pas de pompiers, donc.
Soudain, dans l’air surchauffé, le feu
poussé par les bourrasques grimpa dans les rues en ciment et en pavé, sans rien
pour le nourrir, si ce n’était l’oxygène. Des flammèches pénétraient sous les
ardoises et attaquaient les poutres. Les maisons vides en cette saison se
trouvaient en danger.
Le vent fit tomber un arbre enflammé sur
une cuve de gaz. Mais, par miracle, elle avait résisté et il n’y eut pas de catastrophe.
En tous lieux du village, on s’évertuait à sauver sa vie, dont le sort se
trouvait étroitement lié à celui de la maison. Ici, il fallait grimper sur le
toit d’une terrasse vitrée pour éteindre les flammes ; là, on arrosait
sans fin les abords de la maison, tandis que des animaux, réfugiés dans une
cabane en bois, périssaient.
Puis, comme le feu avait brûlé les lignes
électriques et que, par conséquent, les moteurs de la station de pompage ne
fonctionnaient plus. Il n’y eut plus d’eau. Un des hommes qui luttait contre l’incendie
depuis plus d’une heure pour défendre une maison, devant ce dernier coup du
sort, se laissa tomber par terre, de rage et d’épuisement. Alors, le vent
tourna encore et éloigna les flammes pour attaquer les dernières maisons vers
le sud.
Sans eau, les habitants de la maison la
plus exposée n’avait plus que la ressource de se calfeutrer dans la maison et
espérer. Le téléphone du mobile sonnait mais on ne répondait pas afin de garder
le peu de batterie qui restait.
Enfin, le vent tourna une nième fois et
semblait vouloir aller vers un des villages voisins. Cette maison et ses
habitants étaient sauvés.
Alors, un peu trop tard pour ce village,
pais à temps pour le suivant, la pluie tomba enfin et les flammes se calmèrent.
Le vent était redevenu normal. Dans la nuit, des foyers brûlaient encore, tout
autour du village et on ne connaissait que trop bien le paysage qu’on verrait
au matin.
À présent, il fallait savoir s’il y avait
des victimes et si des maisons avaient brûlé.
Une bergerie et cinq maisons avaient
brûlée. Toutes ces maisons étaient inoccupées et le feu avait pris depuis le
toit.
Monsieur Salmigondi découvrit un spectacle
qui lui fit monter les larmes aux yeux. Sauf à certains endroits, langues de
verdures étrangement épargnées par le vent en tournant, tout était calciné
jusqu’au sol couvert de cendres noires. On voyait les anciens murets de
séparation des terrains, des chemins oubliés et les lieux par où s’écoulait la
pluie.
Sur les cinq maisons, une seule était
neuve. Les pompiers avaient pu passer et s’appliquaient à éteindre les
dernières flammes et tentaient de sauver ce qui pouvait l’être dans les maisons
aux toits et au planchers écroulés. Il fallait scier les poutres pour empêcher
qu’elles entraînent les murs.
Comment le village allait-il se relever ?
Et pour effacer les traces dans la nature, il faudrait des années, même si les
arbres n’avaient pas brûlé, bien que noircis en surface, et qu’ils se
reprendraient vite.
— Ne croyez pas ! dit Petru à Salmigondi. Dans
quatre mois, les fougères seront toutes ressorties, vertes comme auparavant, et
ont verra des feuilles paraîtres sur les arbres ! En revanche, pour les
arbousiers, les cistes et les genêts, il faudra des années pour que ça revienne
comme avant !
— Oui, mais on a perdu cinq maisons ! maugréa Paolu
qui n’avait pas envie de rire. Cinq maisons, ce n’est pas rien ! Ça fait
un paquet d’habitants !
— Les maisons sont assurées ! objecta naïvement le
touriste qui avait tout vécu.
— Certaines, oui ! Pour d’autres, avec cette
histoire de biens indivis…
— Je croyais que tout avait été mis en ordre ! dit
Salmigondi.
— Pensez donc ! soupira le cafetier. Il y a des
indivisions qui remontent à plus d’un siècle ! Pour retrouver tous les
héritiers, c’est un capatoghju !
Pardon, une prise de tête ! Un vrai casse-tête ! Les Chinois ont
copié sur les Corses pour leurs casse-têtes ! Il y a des héritiers aux
USA, en Argentine, au Mexique, en Afrique, et aux quatre coins de la Terre !
— Quand on réussit à reconstituer les arbres
généalogiques sur plusieurs générations ! ajouta Petru. Et il faut
prier que les terrains ou les maisons aient été partagés après l’invention de l’État-Civil
sous Napoléon 1er, sinon, tout se trouve à l’évêché, puisque les
registres des naissances, mariages, décès, étaient auparavant tenus par les
curés ! Même dans les registres civils, on ne mentionne parfois que les
prénoms et pas les noms ! Vous imaginez le travail !
— Alors, devant des maisons qui appartiennent à une
multitude de co-propriétaires qui n’auraient qu’une fraction de pièce chacun, ceux
qui habitent ces maisons ne les assurent pas toujours ! conclut le patron
du Café.
— Maintenant, j’ai vu ! soupira le vacancier, dans
l’air chargé de l’odeur de maquis brûlé qui le faisait tousser par moment. Les
fougères brûlent bien en janvier ! Mais, je me serais bien passé de voir
ça ! J’ai envie d’en pleurer !
— Monsieur, je ne vous connaissais pas jusqu’à hier !
intervint Petru, sur un ton de professeur. Mais, je vous ai vu défendre la
maison où vous résidez pour les vacances, puis aider à défendre celles des
autres ! À présent, je vous connais ! Je sais ce que vous valez !
Vous êtes des nôtres, à jamais ! Mais, il y a un petit problème, un
problème très embarrassant voyez-vous…
— Quel est le problème ? se raidit Salmigondi.
— Si vous êtes des nôtres, on ne peut vous appeler
monsieur ou Salmigondi ! Ça, c’est bon pour ceux qui sont en dehors du
cénacle ! Quel est votre prénom ?
— On m’appelle par mon second prénom, Antoine ! Pour
les amis, c’est Tony !
— Eh bien, Tony ! Bienvenue chez vous !
— Vous pensez qu’il y aura une aide de l’État ?
— Vu l’ampleur des sinistres, car il n’y a pas que nous
qui avons morflé, je crois que oui ! Des dossiers à faire et tout un tas
de paperasses !
— Maintenant, ce sera à qui pleure le plus ! ricana
Paolu. Et ceux qui crieront le plus fort ne seront pas les plus atteints ou les
plus irréprochables !
— Peu importe ! soupira le cafetier, désabusé. Le
tout, c’est que les vrais sinistrés soient indemnisés ! Si on ne donne pas
aux Restos du cœur, parce que des profiteurs se glissent au milieu, ce sont
ceux qui sont dans le besoin qui vont payer le plus ! Pas les profiteurs !
Il y a toujours eu des personnes qui se glissent dans le tas et il y en aura
toujours ! L’essentiel est d’aider les autres !
— Tiens, pour une fois que tu dis quelque chose d’intelligent,
dit Petru, on peut te laisser le mot de la fin !
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